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Varicelleprint

Une étude d’impact en Belgique

publié le mercredi 13 avril 2016

La varicelle est une infection généralement bénigne, mais elle peut être responsable d’hospitalisations et de complications. Une étude belge permet de chiffrer l’incidence de ces conséquences.

La varicelle est causée par le virus herpès varicella zoster (VZ). L’infection se manifeste généralement par une éruption vésiculaire associée à des signes comme de la fièvre et un malaise général. L’infection est autolimitée chez la grande majorité des personnes infectées.
Cependant, quelques complications sont décrites, principalement cutanées ou liées à des surinfections bactériennes ; on note aussi des troubles du système nerveux central, des pneumonies et des désordres hématologiques. Ces complications sont plus fréquentes et sévères parmi des sous-groupes de personnes tels que les adultes et adolescents, les personnes avec immunodéficience, les femmes enceintes. Mais elles peuvent aussi survenir chez des enfants en bonne santé. Une varicelle contractée par une femme enceinte durant le premier trimestre de grossesse peut entraîner des malformations fœtales.

Vaccination

Un vaccin vivant atténué contre la varicelle est disponible depuis les années ’70. Sûr et efficace, ce vaccin est utilisé dans le cadre de programmes de vaccination généralisée depuis plus de 10 ans dans de nombreux pays, tels que les USA, le Canada, l’Australie et l’Allemagne.
Selon plusieurs études américaines et européennes, la vaccination universelle contre la varicelle entraîne une diminution d’au moins 88% de l’incidence de l’infection, ainsi que de la mortalité, des complications et des hospitalisations qui y sont liées.
Même si un léger glissement du pic d’incidence vers les enfants plus âgés est relevé, l’impact positif de la vaccination est démontré dans tous les groupes d’âge.
Sur base de la surveillance épidémiologique menée sur le long terme, le consensus actuel est de recommander un schéma de vaccination à 2 doses, afin d’éviter des poussées épidémiques et d’accroître l’efficacité vaccinale et l’immunité de groupe.

Malgré un bilan favorable, la vaccination généralisée contre la varicelle n’est implantée que dans 5 des 28 pays de l’Union européenne. Le motif principal en est une balance coûts/bénéfices mal évaluée dans le contexte socio-économique de ces Etats, ainsi que la concurrence des nombreuses priorités de santé dans un contexte de ressources budgétaires limitées. En outre, des études évoquent un accroissement temporaire des cas de zona suite à la mise en place d’une vaccination généralisée, en raison d’une baisse des rappels naturels (liés à une rencontre plus rare avec le virus VZ circulant dans la population).

Epidémiologie

En Belgique, l’incidence de la varicelle est estimée à environ 113.000 cas par an, occasionnant entre 28,8 et 35,7 consultations de médecine générale par 10.000 habitants par an.
Dans un contexte où la vaccination n’est pas recommandée, la couverture vaccinale dans le pays est estimée à moins de 2,5% pour le schéma de 2 doses.

L’étude belge

L’étude menée à l’échelle nationale repose sur la collecte des données de tous les cas de varicelle chez les enfants âgés de 0 à 15 ans, hospitalisés en services pédiatriques en Belgique, sur une période d’une année (du 1 novembre 2011 au 31 octobre 2012).
Les données de 101 hôpitaux, couvrant 97,7% de la totalité des lits pédiatriques du pays, ont été recueillies.

Les hospitalisations

Cinq cents cinquante deux enfants ont été hospitalisés pour varicelle durant la période étudiée. L’incidence d’hospitalisation pour varicelle était de 29,5 pour 100.000 personnes par an ; l’incidence des cas hospitalisés avec complications était de 19/100.000 personnes par an.
L’incidence était la plus élevée parmi les enfants en âge préscolaire, qui constituent la majorité des hospitalisations et complications relevées.
Le taux de cas avec complications était pratiquement similaire entre les enfants âgés de 1 à 4 ans et les enfants âgés de 5 à 14 ans (78% et 75% respectivement), et nettement moindre chez les enfants âgés de moins d’un an (51%).

La répartition temporelle des hospitalisations reflète le pic saisonnier habituel de l’infection, à la fin du printemps (mois de mai et juin). Le pic d’incidence des consultations ambulatoires en médecine générale, relevées par le réseau des médecins vigies, était concordant, atteignant 495/10.000 enfants durant la même période.

La combinaison de ces données permet d’estimer le risque d’hospitalisation lié à la varicelle à environ 1,6% parmi la population en âge préscolaire (0 à 4 ans).

Parmi les enfants hospitalisés, la majorité étaient âgés de moins de 4 ans ; 14% présentaient au moins une affection chronique sous-jacente.
Quarante pourcents (79/552) des enfants présentaient une éruption vésiculaire sévère à l’admission. Le temps médian entre l’apparition des premières lésions et l’hospitalisation était de 3 jours.
Le motif principal de l’hospitalisation était une suspicion d’infection bactérienne (49%), un état général altéré (20%), une anorexie et/ou déshydratation (11%), la présence de complications neurologiques (10%), une pneumonie concomitante (9%), une fièvre élevée persistante (6%), une stomatite (5%), une affection sous-jacente (5%), un âge de moins de 3 mois (3%) et des raisons sociales (3%).
L’admission de 34% des enfants de moins de 2 ans était justifiée par un état général altéré, une fièvre élevée ou des difficultés d’alimentation.

Les complications

Soixante cinq pourcents des enfants (357/552) avaient une ou plusieurs complications, dont les surinfections bactériennes (à l’exclusion de la pneumonie) représentent la majorité (235 enfants).
Les infections de la peau et des tissus mous touchaient 204 enfants.
Les complications neurologiques survenues chez 56 enfants (10%) se répartissaient en convulsions fébriles (29 cas), en ataxie cérébelleuse (13 cas) en encéphalite (6 cas) et en méningite (2 cas).
Quarante neuf enfants présentaient une pneumonie, dont 21 d’origine virale et 28 ayant une étiologie bactérienne suspectée.
Les complications plus rares étaient un rash vésiculaire hémorragique (2 cas), un syndrome des 3 S « staphylococcal scalded skin » (1 cas) et un purpura vasculaire disséminé (1 cas).

Seuls 26% des cas hospitalisés ont reçu un traitement par aciclovir, pour une durée médiane de 5 jours.
Par contre, 58% des enfants (322/552) ont reçu une antibiothérapie (pour la moitié en intraveineux), pour une durée médiane de 7 jours.
Une intervention chirurgicale a été nécessaire pour 15 enfants (3%) (drainage pleural ou d’un abcès, débridement de plaie, etc).
L’admission en unité pédiatrique de soins intensifs a été requise pour 20 enfants (4%), pour une durée médiane de 5 jours.

Le décès d’une fillette de 17 mois a été enregistré, dans un contexte de septicémie 6 jours après l’apparition de l’éruption ; un syndrome de choc toxique lié à un Streptococcus ß-hémolytique du groupe A est suspecté. L’incidence de la mortalité est donc de ± 0,2% parmi les cas hospitalisés.
Sur base de l’analyse des certificats de décès, le taux de mortalité par varicelle en Belgique est de ± 0,5/1.000.000 parmi la population pédiatrique de 0-15 ans.

Quatre des 552 enfants hospitalisés (1%) présentent des séquelles suite à l’infection : arthrite, ataxie, épilepsie complexe ou thrombophlébite. Des lésions cutanées persistent chez 9% des enfants (51/552).

Limites et intérêts de l’étude

Il est possible que toutes les admissions pour varicelle n’aient pas été reprises dans l’étude, car certains cas ont, par exemple, pu être enregistrés directement comme infections bactériennes, sans que le lien soit établi avec une varicelle récente. Par ailleurs, une étude limitée à 12 mois ne permet pas de mesurer des variations annuelles. Cependant, l’étude démontre un impact significatif de la varicelle, plus particulièrement parmi les enfants âgés de 0 à 4 ans. Les données de cette étude sont concordantes avec celles rapportées dans d’autres études européennes.

Conclusions

La varicelle est à la source, dans notre pays, d’hospitalisations (risque estimé à environ 1,6% des cas de varicelle) et de complications parmi des jeunes enfants préalablement en bonne santé. Les données de cette étude contribueront à alimenter le débat et l’analyse sur l’utilité d’une vaccination généralisée contre la varicelle dans notre pays. Cependant, la poursuite d’études de suivi à long terme de la vaccination généralisée dans les pays où elle est recommandée est nécessaire pour affirmer l’efficacité et démontrer une balance couts/bénéfices favorable de cette stratégie.

Dr Sophie Blumental (HUDERF), Dr Martine Sabbe (SIPH), Pr. Philippe Lepage (HUDERF).

Référence :
S. Blumental, M. Sabbe and P. Lepage. Varicella paediatric hospitalisations in Belgium : a 1-year national Survey. Arch Dis Child. 2016 ; 101 : 16-22. doi:10.1136/archdischild-2015-308283.


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