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Pneumocoqueprint

Avis du Conseil supérieur de la santé

publié le dimanche 1er mai 2011

Le Conseil supérieur de la santé (CSS) propose dans un avis récent de faire évoluer le programme officiel de vaccination contre le pneumocoque de l’actuel vaccin conjugué heptavalent au nouveau vaccin à 13 valences.

Les Streptococcus pneumoniae sont répartis, sur base de leur capsule polysaccharidique, en 46 sérogroupes comportant plus de 92 sérotypes différents. Les anticorps protecteurs produits par le vaccin contre le pneumocoque sont spécifiques du sérotype. Cependant, il existe une immunité croisée partielle variable entre différents sérotypes du même sérogroupe.

Nouveaux vaccins

En Belgique, la vaccination anti-pneumococcique des enfants est actuellement réalisée au moyen du vaccin conjugué à 7 valences (PCV7 : Prevenar™). En raison de la disponibilité de deux nouveaux vaccins sur le marché belge, à savoir un vaccin antipneumococcique conjugué à 10 valences et un autre à 13 valences, le CSS a comparé le vaccin conjugué à 7 valences à ceux-ci.
Le vaccin conjugué 7-valent utilise comme protéine porteuse une toxine diphtérique modifiée liée aux sérotypes 4, 6B, 9V, 14, 18C, 19F et 23F. Le vaccin a été intégré en 2007 au calendrier vaccinal de base des Communautés et mis gratuitement à disposition des vaccinateurs pour un schéma 2 + 1 (2 doses à 2 et 4 mois suivie d’un rappel à 12 mois), avec un rattrapage jusqu’à l’âge de 2 ans.
La couverture vaccinale a été estimée, pour 2008 - 2009, à plus de 95% pour la première dose, de 90% pour la 2ème et de 81-89% pour la 3ème.

Les deux nouveaux vaccins, l’un 10-valent (Synflorix™, GSK) et l’autre 13-valent (Prevenar13™, Pfizer) ont été approuvés par l’Agence Européenne du Médicament. Le vaccin 10-valent comprend des antigènes des sept sérotypes du PCV7 plus les sérotypes 1, 5 et 7F. Dans le vaccin 10-valent, les sérotypes sont conjugués pour 8 d’entre eux à une protéine d’Haemophilus influenzae ; les sérotypes 18C et 19F sont conjugués respectivement à l’anatoxine tétanique et à l’anatoxine diphtérique. Le vaccin 13-valent comprend également les sept sérotypes du PCV7, plus les sérotypes 1, 3, 5, 6A, 7F et 19A ; tous ces antigènes sont conjugués à la toxine diphtérique modifiée.

Pour rappel, le vaccin polysaccharidique 23-valent (Pneumo 23™) contient un mélange de polysaccharides des souches de sérotypes 1, 2, 3, 4, 5, 6B, 7F, 8, 9N, 9V, 10A, 11A, 12F, 14, 15B, 17F, 18C, 19A, 19F, 20, 22F, 23F et 33. Le système immunitaire des jeunes enfants, en raison de son immaturité, répond mal à la stimulation par des polysaccharides et l’efficacité de ce vaccin est très limitée en dessous de 2 ans. Ce vaccin est recommandé pour la vaccination d’une part des personnes âgées (65 ans et +) et d’autre part des personnes à haut risque d’infection pneumococcique, quel que soit leur âge.

Epidémiologie

Les infections à pneumocoques surviennent fréquemment en pédiatrie. On estime qu’annuellement, environ 735.000 enfants âgés de moins de 5 ans décèdent sur la planète d’infections à pneumocoques (11% des causes de décès pour ce groupe d’âge).

Les infections invasives

En pratique, les infections invasives à pneumocoques (IPD) se limitent aux méningites, septicémies, pneumonies avec bactériémie et/ou empyèmes, bactériémies sans foyers et à d’autres infections plus rares comme les arthrites, les péritonites, etc.
Avant l’introduction de la vaccination anti-pneumococcique chez l’enfant, l’incidence des infections invasives variait énormément d’un pays à l’autre. En Belgique, le nombre total d’IPD chez les enfants de moins de 5 ans en 2002-2003 était estimé à 414 cas (après correction pour le sous-rapportage), soit une incidence de 72/100.000. Chez les enfants de moins de 2 ans, l’incidence des IPD était de 130/100.000 tandis qu’elle était estimée à 35/100.000 pour la tranche d’âge des 2 à 5 ans.
On observe une réduction significative de l’incidence des IPD chez les enfants de moins de 2 ans lorsqu’on compare la période pré-vaccinale (2002-2003) et l’année 2008. Les sérotypes vaccinaux ont quasi disparu, mais ils ont été en par- tie remplacés par des sérotypes non vac-cinaux, en particulier le 7F, le 19A et le 33F.
Chez les enfants de 2 à 4 ans par contre, on note une augmentation de l’incidence globale liée à la progression très impor- tante des infections dues à des séro-types non vaccinaux ; c’est en particulier le sérotype 1 qui a été associé à un accroissement des cas d’empyèmes. L’augmentation du nombre de pneumo-nies compliquées était déjà observée avant l’introduction de la vaccination.
L’impact global de la vaccination avec le vaccin conjugué 7-valent n’est pas aussi spectaculaire qu’aux Etats-Unis étant donné le remplacement plus marqué par des sérotypes non vaccinaux. L’impact est cependant comparable à celui observé dans d’autres pays européens 1 à 2 ans après l’introduction du PCV7. En termes de maladies invasives, ce sont surtout les bactériémies qui diminuent ; le bénéfice sur les méningites est plus limité étant donné l’augmentation des cas dus à des sérotypes non vaccinaux (réduction non significative et petit nombre de cas).
Au vu de l’épidémiologie belge actuelle et de l’incidence élevée du pneumocoque du sérotype 19A, en particulier dans les infections les plus sévères (8 méningites rapportées au laboratoire de référence en 2009), la couverture théorique offerte par le vaccin 13-valent (65% pour les 6 sérotypes additionnels chez les moins de 5 ans en 2008) est supérieure à celle conférée par le vaccin 10-valent (38% pour les 3 sérotypes additionnels chez les moins de 5 ans en 2008) ; cette estimation ne tient pas compte d’une hypothétique protection croisée des anticorps anti-19F contre le sérotype 19A pour le vaccin à 10 valences.

Les infections non invasives

En Europe, on estime l’incidence annuelle des pneumonies à 6/100 enfants chez des enfants âgés de moins de 5 ans, ce qui représente plus de 3 millions de nouveaux cas annuellement. La pneumonie reste une des causes de décès pédiatrique les plus fréquentes, même dans nos régions. S. pneumoniae y est aujourd’hui l’agent bactérien le plus souvent rencontré.
En Belgique, il n’existe pas de données d’incidence de pneumonie chez l’enfant, ni en ambulatoire, ni en hospitalisation. Cependant, les données des résumés cliniques minimums (RCM) indiquent qu’en moyenne plus de 4.000 enfants de moins de 5 ans sont hospitalisés avec une pneumonie chaque année (2000-2007), mais dans 2/3 des cas, l’agent étiologique n’est pas spécifié.
Selon une récente méta-analyse Cochrane d’études randomisées contrôlées, il apparaissait que l’efficacité de la vaccination avec le vaccin conjugué contre le pneumocoque était de 27% vis-à-vis des pneumonies établies par radiologie chez les enfants HIV négatifs âgés de moins de 2 ans. En Belgique, l’incidence des pneumonies bactériennes causées par les sérotypes vaccinaux chez les enfants de moins de 2 ans baissait, ce qui n’était pas le cas pour l’incidence globale.
Bien que nous ne disposions pas de données épidémiologiques fiables d’incidence des pneumonies et des otites moyennes aiguës (OMA) en Belgique, on peut penser que les 2 nouveaux vaccins auront un impact potentiellement plus important que le vaccin actuel PCV7 sur les pneumonies, en particulier pour les sérotypes 1, 7F et 5.
Les otites moyennes aiguës constituent le motif de consultation pour maladie le plus fréquent en pédiatrie. Quatre-vingt pourcents des enfants vont présenter au moins un épisode d’OMA avant l’âge de 3 ans. En Belgique, l’incidence annuelle a été estimée à 136/1.000 enfants chez les moins de 4 ans. Cela représente plus de 65.000 cas par an. Environ 80 % des OMA sont causées par S. pneumoniae et H. influenzae, le pneumocoque étant généralement un peu plus prévalent. Pour le reste, Moraxella catharralis est le 3ème germe en fréquence et on retrouve parfois du S. pyogenes.
Selon une revue Cochrane récente, l’efficacité du vaccin heptavalent contre les OMA atteint 6 à 7%. Ce chiffre marginal peut cependant avoir un impact en raison de la fréquence de la maladie. L’efficacité est plus grande pour les OMA récidivantes et lors du placement de drains trans-tympaniques. D’autre part, diverses études montrent un accroissement des sérotypes non vaccinaux, en particulier le 19A (intermédiaire ou résistant à la pénicilline).
On peut probablement attendre une protection plus importante contre les OMA du vaccin 10-valent par la protection additionnelle sur les Haemophilus influenzae non-typables. Cette protection additionnelle du 10-valent par rapport au 13-valent est estimée à environ 10%, soit de 6.500 à 33.000 épisodes d’OMA épargnés en plus selon la source.

Avis

La priorité en termes de santé publique aux yeux du Conseil supérieur de la santé est la prévention des infections invasives graves potentiellement létales ou causant des séquelles neurologiques irréversibles. Il convient donc de proposer le vaccin offrant la protection la plus large contre ces infections sévères compte tenu de notre épidémiologie locale.
Par ailleurs, les choix doivent être basés sur les données scientifiques solides dont nous disposons. Certaines données encore spéculatives doivent être étayées avant d’être prises en compte dans les décisions.
A l’heure actuelle, le vaccin correspon-dant le mieux à ces exigences est un vaccin 13-valent contenant les sérotypes 1, 3, 4, 5, 6A, 6B, 7F, 9V, 14, 18C, 19A, 19F et 23F. C’est la raison pour laquelle il est, compte tenu des données disponibles à ce jour, proposé de passer à ce vaccin 13-valent dans le cadre des programmes des pouvoirs publics, lorsque les conventions actuelles conclues par les Communautés arriveront à échéance.

Référence :
 Publication du Conseil supérieur de la santé n° 8687 du 6 octobre 2010. Vaccination chez l’enfant. Vaccins antipneumococciques 7-, 10, et 13-valent.
 Avis du CSH 8193, 2006.

Pour la pratique

En Belgique, la vaccination contre le pneumocoque des nourrissons comporte 3 doses de vaccin conjugué, aux âges de 8 semaines, 16 semaines et 12 mois.

Schéma de rattrapage
 Si la 1ère dose est donnée avant 10 mois, la dose 2 est administrée à un intervalle de 8 semaines et la dose 3 à l’âge de 12 mois ou 6 mois après la 2ème dose
 Si la 1ère dose est donnée à l’âge de 10 ou 11 mois, la dose 2 est administrée à un intervalle de 6 mois
 Si la 1ère dose est donnée entre 12 et 24 mois, aucune dose supplémentaire ne doit être donnée.

Au-delà de l’âge de 2 ans, la vaccination n’est recommandée qu’aux enfants présentant un risque fortement accru d’infection invasive à pneumocoque.

Référence :
Guide de vaccination (version actualisée 2009). Conseil Supérieur de la santé.


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