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Pneumocoqueprint

Vaccin conjugué pour les enfants

publié le mardi 1er janvier 2002

Le pneumocoque est à l’échelle planétaire le principal agent des infections bactériennes graves chez l’enfant. De nombreux sérotypes pathogènes différents existent, caractérisés par leur capsule polysaccharidique.

Les jeunes enfants sont porteurs dans le nasopharynx.
On constate une résistance croissante de cette bactérie aux macrolides et à la pénicilline.
L’arrivée d’un nouveau vaccin conjugué contre le pneumocoque offre la possibilité de protéger les jeunes enfants contre les infections invasives à pneumocoques. Un futur vaccin contre le méningocoque B pourrait constituer le dernier pilier d’une protection contre les infections bactériennes invasives.

Infections pneumococciques chez les enfants

Infections invasives

En Belgique, l’incidence des infections invasives à S. Pneumoniae, chez les enfants âgés de moins de 5 ans, était en 2000 de 30,2/100.000 (dont méningites : 4,3/100.000). Ces chiffres sont comparables à ceux de pays voisins comme le Royaume-Uni, le Danemark, la Suisse et la Finlande. Dans une étude prospective finlandaise, on trouvait S. pneumoniae dans 15% de toutes les hémocultures positives en lien avec les pathologies sous-jacentes suivantes : bactériémie sans foyer dans 69% des cas, pneumonie dans 15% et méningite dans 11%. Les suites d’une méningite à pneumocoque sont très graves et 25 à 30% des enfants qui y survivent ont des séquelles neurologiques graves. Elles sont plus importantes que celles qui sont causées par H. influenzae ou N. meningitidis.

Pneumonies aiguës

Il est difficile de démontrer l’origine bactérienne d’une pneumonie aiguë chez les enfants : il n’y a aucune concordance avec les cultures bactériennes de prélèvements nasopharyngés, l’obtention d’ expectorations n’est pas possible et les hémocultures sont d’un rendement très faible. L’aspect radiographique n’est pas suffisamment spécifique pour signer une pneumonie à pneumocoque et la bronchoscopie ne peut être utilisée à grande échelle. Les données disponibles dans les pays développés nous apportent des précisions : la pneumonie à pneumocoque est exceptionnelle en dessous de l’âge de 6 mois, et au-delà, on constate un accroissement progressif de la responsabilité du pneumocoque dans les pneumonies bactériennes. Une étude récente menée au Royaume-Uni a montré que, parmi 251 enfants âgés de moins de 5 ans et présentant une pneumonie ou une bronchopneumonie, la grande majorité restait sans diagnostic quant à la bactérie responsable, sauf 3 cas (1,2%) avec une hémoculture positive pour S. pneumoniae. Des données pour la Belgique ne sont pas disponibles.

Otites moyennes aiguës

S. pneumoniae est la cause la plus fréquente des otites moyennes aiguës chez les petits enfants. Dans une étude finlandaise, S. pneumoniae a été trouvé chez 18 à 30% des patients lors de myringotomie. L’otite moyenne est également très fréquente : des études épidémiologiques aux Etats-Unis montrent que parmi les enfants, 10% font au moins une otite avant l’âge de 3 mois, environ 60% avant l’âge de 1 an et plus de 80% avant l’âge de 3 ans. On estime qu’en Belgique, les pneumocoques sont responsables chaque année de 100.000 à 150.000 épisodes d’otite chez les enfants de moins de 5 ans. Cela entraîne une grande consommation d’antibiotiques. Les complications rencontrées sont des troubles de l’ audition et un retard d’acquisition du langage.
La plupart des études menées en milieux d’accueil montrent que les enfants sont souvent porteurs nasopharyngés de pneumocoques résistants et que ces mêmes germes sont retrouvés en cas d’otite moyenne. Ce portage s’accroît progressivement jusqu’à l’âge de 3 à 5 ans, après quoi il augmente à nouveau. Les pneumocoques ont acquis au cours des dernières années un haut degré de résistance : en cas d’otite moyenne aiguë chez des enfants de moins de 5 ans, durant l’année 2000, 30% étaient résistants à la pénicilline et 55% aux macrolides. Lors d’isolement à partir du liquide cérébrospinal, le taux de résistance atteignait 20% entre 1998 et 2000.

Vaccins polysaccharidiques

Les premiers vaccins ont été mis au point dans les années 40. En 1977, un vaccin à 14 valences a été mis sur le marché, suivi en 1983 par un vaccin 23-valent. Ce dernier possède des capsules polysaccharidiques des sérotypes 1, 2, 3, 4, 5, 6B, 7F, 8, 9N, 9V, 10A, 11A, 12F, 14, 15B, 17F, 18C, 19A, 20, 22F, 23F et 33F. Certains ont été choisis en raison de leur importance dans les infections invasives, d’autres ont pour fonction d’améliorer la réponse immunitaire.
Le vaccin provoque dans 30 à 50% des cas des réactions locales comme un érythème, une induration et une douleur, principalement lorsqu’il est administré à des personnes jeunes. Les effets secondaires et la fièvre sont plus prononcés chez les personnes qui ont encore des anticorps polysaccharidiques dans leur sérum. Les effets secondaires sont également plus souvent rencontrés lorsque le vaccin est donné simultanément à un vaccin contre l’Hib et un vaccin contre le méningocoque, mais la réponse immunitaire n’en est pas influencée.
On sait que le vaccin n’est pas destiné aux enfants de moins de 2 ans et qu’il ne donne pas une immunité de longue durée, même après l’âge de 2 ans. Ceci découle du fait que les antigènes polysaccharidiques induisent une production d’anticorps indépendamment du système des cellules T et ne construisent aucune mémoire immunitaire. Après une infection nasopharyngée par pneumocoque, on constate une production variable d’ anticorps, en fonction de l’âge et du sérotype. Après une dose unique du vaccin à l’âge de 3 mois, il y a également une réponse temporaire pour les types les plus immunogènes, entre autres le type 3, mais la réponse est présente pour une série de types importants comme le type 23F. Une deuxième dose n’améliore pas cette réponse ; la réponse est même plus faible, et ceci est également retrouvé chez des adultes immunocompétents. La réponse est liée à l’âge et au sérotype. Le vaccin a donc des limites : certaines capsules sont peu immunogènes ; il y a peu de réponse avant l’âge de 2 ans ; la protection décroît très rapidement et la revaccination n’ a pas d’effet booster car aucune mémoire cellulaire (B-cell) n’est constituée.

Vaccins conjugués

Lorsque les polysaccharides bactériens sont conjugués à des protéines por- teuses, ils sont captés par des macrophages ; de cette façon, les cellules T-helper stimulent des cellules B, spécifiques des polysaccharides, qui ont également capté les polysaccharides des molécules conjuguées. Ces cellules B produisent alors des anticorps et subissent une maturation en cellules plasmatiques et en cellules à mémoire. Un polysaccharide conjugué à une protéine porteuse est donc reconnu par le système immunitaire comme un antigène dépendant des cellules T (voir article précédent). Grâce aux propriétés immunologiques d’un tel antigène, une forte production d’anticorps se met en place et une mémoire immunitaire se développe, même lorsque l’antigène est administré lors des premiers mois de la vie. Chaque capsule polysaccharidique du vaccin contre le pneumocoque doit être liée à une protéine. On utilise à cet usage les mêmes protéines que celles qui sont contenues dans l’Hib (CRM ou non toxic cross-reactive mutant de la toxine diphtérique et TT ou toxine tétanique). Bien que dans le cas du pneumocoque, la plus grande diversité de polysaccharides doit de préférence être incluse, la quantité totale de protéines porteuses doit rester limitée. La quantité de protéines doit être suffisante pour éveiller une réponse de type T, mais doit être suffisamment réduite pour ne pas induire par elle-même une formation d’anticorps. Ceci explique que les vaccins conjugués comportent un nombre limité de types. Jusqu’à présent, un maximum de 11 sérotypes ont été associés dans un vaccin conjugué. Le nouveau vaccin qui sera bientôt disponible en Belgique est un vaccin heptavalent et comporte les sérotypes 4, 6B, 9V, 14, 18C, 19F et 23F (Prévenar). Ces 7 sérotypes sont responsables de 81% des infections invasives chez les enfants âgés de moins de 5 ans et de 79% des méningites en Belgique. Ils représentent également, en ce qui concerne les enfants, 97% des souches résistantes aux macrolides, 95% des souches résistantes à la pénicilline et 100% des souches résistantes aux céphalosporines de troisième génération.
Le schéma de base comporte 2 ou 3 doses à partir de l’âge de 2 mois avec un rappel vers 13-14 mois.

Une vaste étude randomisée (l’étude Kaiser) a été menée aux Etats-Unis auprès de 38.000 nouveau-nés : ils recevaient à 2, 4, 6 et 12-15 mois, en double aveugle, le vaccin heptavalent conjugué contre le pneumocoque ou le vaccin conjugué contre le méningocoque C.
Les résultats montrent une efficacité de 88,9% contre les infections invasives (cependant, un petit nombre d’infections invasives est survenu avec des sérotypes non contenus dans le vaccin).
En ce qui concerne l’otite moyenne, il y avait une réduction de 7% du nombre total d’épisodes, quel que soit le germe, et de 20% du placement de drains transtympaniques parmi le groupe vacciné.
En ce qui concerne la pneumonie, il y avait une réduction de 10,7% des épisodes de pneumonies diagnostiquées sur base de la clinique et de 35% des épisodes de pneumonies mises au point par radiographies. Ces résultats sont difficiles à interpréter puisque dans cette étude, le germe en cause dans la pneumonie n’est pas connu.

Les vaccins conjugués contre le pneumocoque ont démontré leur utilité dans les premières études, principalement pour la prévention des infections invasives, et dans une moindre mesure vis-à-vis de la pneumonie et de l’otite du jeune enfant. Ils diminuent également le portage et peuvent constituer une solution au problème croissant de l’antibiorésistance en Belgique.

Dans une étude finlandaise, le vaccin avait une efficacité de 57% pour l’otite moyenne causée par un des sérotypes contenu dans le vaccin et de 34% pour les otites causées par un pneumocoque sans détermination du sérotype.
Plusieurs études montrent aussi que le vaccin réduit le portage dans le nasopharynx. Enfin, les études laissent supposer que les vaccins conjugués donnent aussi une bonne mémoire immunitaire. Une étude montre que la réponse en anticorps après administration de l’ancien vaccin non conjugué à 23 valences à des enfants de 24 mois est multipliée par 100 dans le groupe où la vaccination a été initiée avec le vaccin conjugué, par rapport à un groupe non préalablement vacciné.
La tolérance était bonne dans toutes les études : 60.000 doses ont déjà été administrées dans les études de tolérance, mais au total, ce sont plus de 10 millions de doses qui ont été administrées depuis la commercialisation du vaccin aux Etats-Unis.
Bien que les vaccins conjugués polysaccharidiques aient montré leur efficacité dans les études, ils ne peuvent offrir de protection contre les sérotypes qui ne sont pas inclus dans le vaccin. Pour cette raison, des recherches sont en cours sur d’autres possibilités d’antigènes protecteurs comme la pneumolysine, l’adhésine pneumococcique de surface A (PsaA) et d’autres qui ne sont pas déterminés par le sérotype. Comme ce sont des protéines, elles provoqueront également une réponse thymodépendante et donc pourront éveiller une immunité de longue durée avec mémoire lors de l’ administration dès les premiers mois de la vie. Ces recherches sont encore à un stade expérimental.

Dr A. Malfroot – Dienst Kinderpneumologie Depart.
Kindergeneeskunde – VUB

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