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Voyages, migrantsprint

Médecine du voyage : Mémo 2011

publié le dimanche 1er mai 2011

Le conseil aux voyageurs doit être personnalisé. Outre l’état de santé de chaque personne, la destination et les circonstances du voyage doivent être évalués, afin d’émettre un avis adapté, basé sur les recommandations scientifiques.

Le nombre de voyageurs internationaux ne cesse de croître. Tout médecin rencontre dans sa patientèle des futurs voyageurs. Cet article fait le point sur quelques notions et données actuelles en médecine des voyages. Pour une information complète, nous renvoyons le lecteur vers le site de l’Institut de Médecine Tropicale www.itg.be : les textes de l’ouvrage « Conseils de santé pour voyageurs » (Médasso), édition 2010-2011, peuvent y être consultés, ainsi que le consensus 2010 de la Société Scientifique de médecine du voyage (mise à jour chaque année en mi-juillet). Des cartes et tableaux par destination et par maladies y sont également consultables.

Vaccinations de base

Tétanos, diphtérie et coqueluche

Une primovaccination complète est essentielle. Un rappel doit être administré si la dernière vaccination date de plus de 10 ans. Si elle date de plus de 20 ans, deux injections à intervalle de 6 mois sont indiquées.
Un vaccin dTpa (Boostrix™) a la préférence si le voyageur est un adulte ou un adolescent qui n’a pas reçu de rappel dTpa à l’âge de 14-16 ans et s’il est en contact avec des nourrissons non ou insuffisamment vaccinés (vaccination « cocoon » des futurs et jeunes parents, grands parents, personnel soignant en pédiatrie, maternité et dans les milieux d’accueil de la petite enfance).
Si le voyageur doit être vacciné également contre la poliomyélite, il y a trois possiblités : Boostrix™ + Imovax™, Revaxis™ (dT-IPV) ou Boostrix polio™ (dTpa-IPV).

Poliomyélite

La vaccination est indispensable pour les voyages vers l’Afrique et l’Asie. Pour les personnes qui ont reçu une primovaccination complète (OPV ou IPV) -ce qui est en principe le cas de tous les individus nés depuis 1967 en Belgique- un rappel IPV à l’âge adulte confère une protection à vie. Ce rappel devrait être considéré pour tous les voyageurs, quelque soit leur destination, en raison de l’immunité à vie obtenue. Pour les personnes non vaccinées (ou en absence de données vaccinales), une primovaccination doit être entreprise (3 doses, pas de rappel nécessaire).

RRO

Une vaccination complète requiert deux doses (la seconde donnée avec un intervalle minimum de 4 semaines après la première). La première dose reste valide quel que soit l’intervalle écoulé avant l’administration d’une seconde dose.

Hépatite A et hépatite B

La vaccination des voyageurs a contribué à réduire considérablement la fréquence des cas d’hépatites parmi ceux-ci :
 pour l’hépatite A, on estime actuellement l’incidence par mois de séjour dans un pays en voie de développement à 40/100.000 (alors qu’on estimait ce chiffre à 300/100.000 il y a 10-15 ans).
 pour l’hépatite B, cette incidence est estimée à 4/100.000/mois (alors qu’on estimait ce chiffre à 80-420/100.000 il y a 10-15 ans).

Une injection de vaccin contre l’hépatite A confère, 15 jours après l’injection, une protection de près de 100%, pendant au moins une année. La deuxième dose (administrée 6 à 12 mois après la première) est indispensable pour une protection de longue durée (probablement à vie). La première dose reste valable quel que soit le délai écoulé (même plusieurs années) avant l’administration d’une seconde dose.
Lorsque la vaccination contre l’hépatite B est également recommandée, on utilise le vaccin combiné contre l’hépatite A et l’hépatite B (Twinrix™) selon le schéma 0, 1 et 6 mois. Deux doses (à un mois d’intervalle) sont nécessaires pour une protection à court terme contre l’hépatite A et 3 doses pour une protection contre l’hépatite B. Les deux premières doses de Twinrix™ donnent une protection temporaire contre l’hépatite A et l’hépatite B de respectivement 99% et 85 %. Ce n’est qu’après l’administration de la 3ème dose qu’une protection de longue durée sera obtenue contre les hépatites A et B (voir encadré plus bas).

Hépatites A et B : schémas rapides

Dans des cas exceptionnels de délai trop court avant le départ, on peut recourir à un schéma à 3 injections IM avec un intervalle d’un mois (0 - 1 - 2), suivies d’un rappel après un an. L’immunité obtenue est suffisante après la 3ème dose. Le rappel après un an est essentiel pour assurer une protection (probablement) à vie.

En cas de manque de temps avant le départ, on peut utiliser un schéma « super » accéléré à 4 doses de vaccin hépatite B monovalent ou de Twinrix™ (jours 0, 7, 21 et 360).

Faut-il mesurer les anticorps après vaccination contre l’hépatite A ou contre l’hépatite B ?
Hépatite A : il n’y a aucune raison de pratiquer systématiquement un contrôle sérologique après vaccination.
Hépatite B : pour les adultes, le Conseil supérieur de la santé recommande de réaliser un contrôle sérologique (anticorps anti-HBs) un à trois mois après la vaccination complète. Si le taux est ≥ 10UI/L, on considère que le patient est immunisé à vie contre le risque d’une infection clinique et contre celui de devenir porteur chronique. Si le taux est ≤ 10UI/L, le sujet est considéré comme non répondeur : il n’est pas protégé contre l’hépatite B. Un nouveau schéma complet peut être proposé à ce patient. Une alternative consiste à administrer 2 doses simultanément (une dans chaque muscle deltoïde), schéma que l’on répète deux mois plus tard. Un nouveau contrôle sérologique (1 à 3 mois après la dernière dose administrée) permettra de déterminer si le patient est protégé ou reste non répondeur.
Chez les personnes immunodéprimées, un suivi régulier reste nécessaire.

Autres vaccins

Fièvre typhoïde

L’hygiène de l’eau et de l’alimentaion est essentielle. La vaccination est conseillée pour des voyages aventureux dans de mauvaises conditions d’hygiène ou pour des voyages en zone endémique d’une durée excédant 3 semaines. Il existe deux vaccins : le vaccin par voie orale (Vivotif™ : un comprimé à jeun à ingérer à 3 reprises avec un intervalle de 2 jours) et le vaccin injectable (Typhérix™ et Typhim™ : une dose). Les deux vaccins donnent une protection de l’ordre de 60-70%, pendant 3 ans.

Méningite à méningocoques

La vaccination contre les méningocoques A, C, W135 et Y (Mencevax™ ACW135Y) est indiquée chez les voyageurs qui se rendent dans les pays de la ceinture des méningites, de fin décembre à fin juin, en Afrique subsaharienne et
 qui sont en contact avec la population locale (transports en commun, nuitées dans des « guesthouses », visite d’amis ou de familles vivant dans ces pays)
 ou qui y séjournent plus de 4 semaines.

La vaccination est obligatoire pour les pèlerins qui se rendent à La Mecque (Hajj et Umra).

En outre, des épidémies locales peuvent survenir ; cependant, les voyageurs ordinaires ne courent pas de risque réel lors d’un bref séjour dans une région touchée, sauf en cas de contacts étroits avec la population locale (voir les actualités sur le site www.itg.be).
La vaccination doit être effectuée au moins 10 jours avant le départ. La protection reste valable 3 ans. Un vaccin conjugué est maintenant disponible (voir article).

Choléra

En raison du risque extrêmement faible de contracter le choléra pour un voyageur, ce vaccin est utilisé uniquement pour des occupations à haut risque (par exemple pour des intervenants dans des situations d’épidémies). Le vaccin oral inactivé Dukoral™ est sûr et confère une protection, après deux doses, de 85 à 90% pendant 6 mois. La protection décroît rapidement chez les enfants, mais demeure suffisante chez 6 adultes vaccinés sur 10.

Rage

Cette maladie est répandue dans de nombreux pays en voie de développe-ment. Il est utile de mettre en garde les voyageurs, en leur conseillant d’éviter de caresser des animaux (sauvages ou domestiques) ou de toucher des animaux morts. La vaccination préventive offre une protection partielle. Elle nécessite 3 injections sur une période de 3 à 4 semaines (jours 0, 7, 21 à 28) et un rappel unique après 1 an.
La vaccination préventive est nécessaire uniquement pour :
 des groupes à risque classique (vétérinaires, chasseurs, gardes forestiers, archéologues, spéléologues, etc) ;
 les voyageurs qui pratiquent régulièrement le cyclotourisme ou le jogging ;
 les personnes qui vont voyager ou séjourner dans des zones rurales où elles ne peuvent pas disposer (aussitôt que possible, maximum 4 jours) de vaccin (préparé sur une culture de cellules) ni d’immunoglobulines antirabiques spécifiques ;
 les expatriés qui partent vivre dans un pays tropical / subtropical.

En cas de morsure suspecte chez une personne vaccinée, une prophylaxie post-exposition reste malgré tout nécessaire. Le schéma prophylactique induit une mémoire immunitaire de longue durée qui permet, en cas d’exposition à la rage, de simplifier fortement la procédure post-exposition (2 injections, aux jours 0 et 3). Les soins de la plaie sont essen-tiels : nettoyage à l’eau et au savon, suivi d’une désinfection.

Encéphalite japonaise

Cette infection se rencontre dans des régions de l’Asie du Sud-Est. Le nouveau vaccin (Ixario™) approuvé par l’EMA pour un usage à partir de l’âge de 18 ans, est le seul disponible actuellement dans les centres de vaccination reconnus. Les enfants d’expatriés peuvent être vaccinés sur place.
Ce vaccin, contrairement à l’ancien vaccin utilisé durant ces dernières années, n’entraînerait pas de réactions allergiques (2 injections à 28 jours d’intervalle).
Les indications sont limitées : voyageurs séjournant plus de 3-4 semaines dans les campagnes des zones endémiques, vivant proche des villages et des fermes dans les zones de rizières et d’élevages porcins ; le vaccin est aussi proposé aux expatriés vivant en ville dans un pays d’endémie.

Encéphalite à tiques d’Europe centrale (TBE ou FSME)

Cette méningo-encéphalite virale est transmise par piqûres de tiques. Elle est endémique dans les zones rurales de plusieurs pays d’Europe centrale, du printemps à l’automne. Ces zones sont reprises sur une cartographie www.zecken.de/index.php ?id=502
La vaccination est conseillée aux voyageurs faisant du camping et de la marche à pied dans ces zones.

Le schéma de vaccination (FSME-IMMUN™ : 0,5 ml pour les adultes ou 0,25 ml Junior entre 1 et 16 ans) comporte 3 injections intramusculaires, avec un intervalle de 1 à 3 mois entre les 2 premières injections ; la 3ème dose est donnée 5 à 12 mois plus tard. Une vaccination de rappel, en cas de nouveau voyage à risque, doit être administrée après 3 ans (puis tous les 5 ans, sauf chez les personnes de 60 ans et plus, pour lesquelles le délai reste de 3 ans).
Si le délai après le dernier rappel dépasse 8 à 10 ans, il est préférable de refaire une vaccination complète.
Une injection unique assure une protection insuffisante (50-75 % après 4 semaines). Il faudra donc toujours administrer, avant le départ vers une région à risque, au moins deux doses (protection de 90-95 % obtenue 2 semaines après la deuxième injection -soit au plus tôt au jour 42).
Dans les cas urgents, on peut recourir à un schéma vaccinal accéléré : deux injections aux jours 1 et 14 (la troisième injection ayant lieu après 5-12 mois) : un taux de protection de 90-95 % est obtenu 2 semaines après la deuxième injection (soit à partir du jour 28). Un premier rappel se fera après 3 ans, ensuite tous les 5 ans.
Une application stricte des mesures de protection contre les tiques est une alternative à la vaccination : port de pantalons longs, chaussettes tirées au-dessus des jambes du pantalon, bottines, utilisation de répulsifs (peau) et de perméthrine (vêtements), inspection systématique deux fois par jour de toute la surface du corps pour détecter les tiques. On enlève la tique en tirant vers le haut avec une pince à épiler.

Les répulsifs contre les moustiques et tiques

Les répulsifs constituent actuellement la seule protection contre la dengue et le Chikungunya, deux maladies en pleine expansion sous les Tropiques. Un vaccin contre la Dengue est en cours d’essai.
Les moustiques vecteurs de la malaria et de l’encéphalite japonaise sont nocturnes. Ceux qui transmettent la fièvre jaune, la Dengue et le Chikungunya sont diurnes.
Les répulsifs à base de DEET ou de Picaridine sont efficaces, à condition de les appliquer régulièrement (± toutes les 4 heures), ainsi qu’après les baignades.
Les répulsifs sont nettement moins efficaces contre les tiques. L’usage de Permethrine sur les vêtements est également utile contre les moustiques et tiques.

NDRL Le vecteur de la Dengue et du Chikungunya (Aedes albopictus) s’est implanté durablement dans des régions de plusieurs pays du sud de l’Europe (Italie principalement, mais aussi France, Espagne, Grèce, Croatie, etc).

Fièvre jaune

Cette infection virale se rencontre dans certains pays d’Afrique et d’Amérique du Sud. Le vaccin est recommandé pour tous les pays endémiques. Il doit parfois être administré également pour des raisons administratives : certains pays l’exigent pour des voyageurs en provenance de pays endémiques. La liste des recommandations et exigences par pays peut être consultée sur www.who.int/ith/en/ et apps.who.int/tools/geoserver/www/ith/index.html

Le vaccin vivant atténué dont nous disposons confère, en une injection, une protection d’une validité de 10 ans, avec une efficacité de 100%. Il est généralement bien toléré, mais peut entraîner un syndrome grippal chez 10 à 30% des personnes vaccinées (avec absentéisme dans moins de 1% des cas).
Des effets indésirables mettant la vie en danger ont été exceptionnellement rapportés ; ils surviennent uniquement lors de la première vaccination, avec une fréquence de 1/200.000 à 300.000 doses.
Ce risque semble plus élevé chez les personnes âgées (1/1.000.000 en dessous de 60 ans, 1/100.000 entre 60 et 69 ans et 1/30.000 au-delà de 70 ans). Dès lors, à partir de l’âge de 60 ans, les bénéfices et inconvénients de cette vaccination doivent être bien évalués, en tenant compte de la destination et du type de voyage. Les enfants seront vaccinés de préférence après l’âge de 9 mois, en raison d’un risque d’encéphalite postvaccinale.
La vaccination est relativement contre-indiquée chez la femme enceinte et allaitante, mais en cas de risque durant le voyage, la vaccination peut être donnée.
Les risques doivent être soigneusement évalués chez les personnes immuno-déprimées. Les personnes jeunes qui, en raison d’une transplantation rénale, d’une maladie de Crohn ou d’autres affections inflammatoires immunomédiées, auront besoin d’un immunosuppresseur, peuvent, avant ce traitement, être vaccinées contre la fièvre jaune si elles projettent un jour de se rendre dans un pays où sévit la maladie.
En cas de contre-indication à la vaccination contre la fièvre jaune, il faut souvent recommander aux personnes concernées l’évitement des régions à risque.
La vaccination doit être administrée dans un centre de vaccination agréé par les autorités sanitaires, puisque seuls ceux-ci sont habilités à compléter le certificat officiel (livre jaune) ; en outre, ces centres disposent de l’expertise pour juger et pondérer les risques et les bénéfices de la vaccination, au cas par cas (âge, grossesse, immunodépression…)

Prof. A. Van Gompel - ITG
Dr P. Trefois

Références :
 Conseils de santé pour voyageurs. Edition 2010-2011 (www.itg.be)
 Réunion de consensus du Groupe d’étude Scientifique de la Médecine des Voyages (www.itg.be)


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