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Coquelucheprint

Résumé de deux études relatives aux épidémies aux Pays-Bas

publié le lundi 3 décembre 2018

Malgré la couverture vaccinale élevée, les pays industrialisés font face à des épidémies régulières de coqueluche. Des recherches sur de nouveaux vaccins contre la coqueluche ou sur une meilleure utilisation des vaccins actuels sont donc nécessaires. Dans cet article, nous donnons un résumé de deux doctorats (Universiteit Utrecht), qui contribuent à une meilleure compréhension de la protection contre la coqueluche.

La vaccination contre la coqueluche a été introduite en 1957 aux Pays-Bas, dans le programme de vaccination national. En dépit d’un taux élevé de vaccination (> 95%), les Pays-Bas, comme d’autres pays industrialisés, connaissent régulièrement des épidémies de coqueluche (tous les 2-3 ans) et une incidence accrue au cours de la dernière décennie.
L’épidémie récente la plus importante a eu lieu en 2012 : plus de 13.000 cas ont été enregistrés durant cette année. Ont été touchés par l’infection non seulement les nourrissons, mais aussi les adolescents et les jeunes adultes. Ces derniers sont à nouveau susceptibles d’être infectés car ils perdent leur immunité au fil des ans (aussi celle non induite par le vaccin) et constituent ainsi une source d’infection pour les nourrissons encore non protégés et particulièrement vulnérables. Une autre raison invoquée comme cause de l’augmentation du nombre de cas de coqueluche est une modification de la bactérie, ce qui peut également avoir un effet sur l’effet du vaccin.
Deux grandes études de sérosurveillance en 1995-1996 et 2006-2007 ont montré que 4% des adolescents et 9,3% des adultes présentaient des signes d’infection récente par la coqueluche (titre d’anticorps anti-PT -toxine de la coqueluche- > 50 UI/ml). Cette constatation indique une circulation élevée de la maladie dans la population générale.
Il faut préciser que les Pays-Bas utilisaient à cette époque un vaccin spécifique, qui différait des vaccins utilisés notamment en Belgique et dont on suppose qu’il présentait quelques faiblesses.

Plusieurs ajustements ont été apportés au programme national de vaccination pour améliorer la protection contre la coqueluche. Le vaccin anticoquelucheux à cellule entière Pw a été rendu plus puissant (de 4 à 7 UI) en 1997 ; la primovaccination a été avancée à un âge plus précoce pour mieux protéger les nouveau-nés en 1999 ; une dose de rappel avec un vaccin anticoquelucheux cellulaire (Pa) a été introduite avant la scolarité (4 ans) en 2001 ; enfin, en 2005, le vaccin Pw a été remplacé par un vaccin acellulaire Pa pour toutes les vaccinations infantiles. Néanmoins, la protection contre la coqueluche reste un défi.

Une connaissance plus fine du fonctionnement de la bactérie est importante pour développer de nouveaux vaccins. Les vaccins actuels n’offrent pas de protection prolongée contre la maladie et contre la colonisation par la bactérie.

Réaction immunologique après vaccination de rappel

Le doctorat présenté par Saskia van der Lee porte sur la réponse immunologique à long terme, après une ou plusieurs vaccinations de rappel (1).
Elle a d’abord étudié la pertinence de la valeur seuil actuelle utilisée pour la collecte des données de sérosurveillance. L’incidence de la coqueluche a été mesurée dans des études longitudinales sur 3 groupes consécutifs d’adolescents (10-18 ans) aux Pays-Bas en 2011-2014, y compris la période de l’épidémie de 2012. La valeur de cutoff sérologique de 50 UI/mL a été utilisée pour les anticorps anti-PT, afin de mesurer la séroprévalence d’une infection récente par la maladie (au cours de la dernière année).

Cependant, par comparaison aux cas signalés au cours de l’épidémie de 2012, des séroprévalences beaucoup plus élevées (jusqu’à 40 fois plus) ont été trouvées. La circulation dans la population adolescente est donc probablement beaucoup plus élevée que prévu. De plus, un nombre important d’adolescents ont conservé au cours du temps des titres d’anticorps élevés, ce qui rend probablement non pertinent le cutoff de 50 UI/mL pour identifier une infection aiguë récente. Des études similaires dans les autres catégories d’âge de la population sont nécessaires pour déterminer la charge de morbidité correcte et également pour estimer quand un vaccin de rappel devrait être administré de manière optimale pour limiter la circulation dans la population générale.

Un deuxième sujet de sa recherche était l’influence du vaccin Pa ou Pw chez les bébés sur les réponses immunitaires aux vaccinations de rappel ultérieures à l’âge de 4 ans, à l’adolescence et à l’âge adulte. La première réaction à l’infection coquelucheuse est une réponse immunitaire innée, suivie d’une réponse immunitaire adaptative plus tard. Cette dernière permet une action plus spécifique contre le pathogène, et construit également une mémoire immunologique, avec l’activation des cellules B et T. Pour la coqueluche, les sous-ensembles Th1, Th2 et Th17 sont les plus pertinents pour la défense contre la maladie. Un vaccin Pw induit plus d’anticorps de la sous-classe IgG1 et plus de cellules Th1, importantes pour la protection contre la coqueluche, comparé à un vaccin Pa qui induit plus précocement des anticorps de sous-classe IgG4 et des réponses immunitaires de type Th2.

Dans une première étude longitudinale chez des enfants âgés de 4 ans, après un rappel avec une dose de DTPa (tétanos, diphtérie, coqueluche acellulaire), une meilleure réponse humorale a été notée avec un vaccin Pa lorsque la primovaccination avait également été réalisée avec un vaccin Pa. La sous-classe IgG4 était également significativement plus élevée chez les enfants qui avaient reçu primovaccination et rappels avec le vaccin Pa que chez les enfants ayant reçu la primovaccination avec le vaccin Pw. Les anticorps de type IgG4 ne peuvent pas se lier au complément et sont liés à une réponse de type Th2 ; ils sont donc très probablement moins protecteurs en raison d’une moindre activité bactéricide. La même augmentation des valeurs d’IgG4 a également été observée pour la diphtérie et le tétanos chez les enfants ayant reçu la primovaccination avec le Pa.

L’étude a également investigué la raison de l’augmentation du nombre d’événements indésirables locaux significatifs chez les enfants de 4 ans qui ont reçu une primovaccination par le vaccin Pa et qui ont reçu un vaccin de rappel Pa, comparativement aux enfants qui ont reçu la primovaccination avec le Pw. Chez ces enfants avec primovaccination Pa, un taux plus élevé d’IgE, d’IgG et d’IL13 a été trouvé, ce qui explique peut-être les effets secondaires locaux plus sévères. Plusieurs vaccinations (N = 5) et rappels avec le vaccin Pa à relativement court terme (4 ans), avec une concentration élevée en antigènes et donc une réponse immunitaire dominante Th2, en sont partiellement responsables.

Chez les préadolescents (9 ans), toutefois, des réponses lymphocytaires B et T-helper plus faibles ont été observées après une vaccination de rappel avec le dTpa, chez les enfants ayant reçu la primovaccination avec le vaccin Pw, comparativement aux enfants primovaccinés avec le vaccin Pa. Des taux d’IgG1 plus élevés ont également été trouvés chez les enfants vaccinés avec le Pw, par rapport aux enfants primovaccinés avec le Pa. Il y avait un rapport Th1-Th2 significativement plus bas chez les enfants vaccinés par le Pa : la primovaccination avec un vaccin Pa ou Pw détermine donc les réponses ultérieures, avec une réponse dominée par Th1 après primovaccination par le Pw. Cette découverte confirme les données épidémiologiques selon lesquelles les enfants primovaccinés avec le vaccin Pa sont plus susceptibles de contracter une coqueluche.

Enfin, la réponse immunitaire à une première dose de rappel de dTpa chez l’adulte a été mesurée après la vaccination des nourrissons avec des vaccins Pw. Les réponses immunitaires humorales IgG et IgA et cellulaires étaient robustes. Les titres d’IgA ont diminué rapidement, mais on estime, selon un modèle mathématique, que les titres d’anticorps IgG resteraient élevés pendant une période relativement longue. Selon l’étude, cette découverte peut avoir un effet sur la recommandation pour la vaccination maternelle.

Actuellement, la vaccination dTpa pendant la grossesse est recommandée à chaque grossesse, car les anticorps chez la femme adulte baissent rapidement, et il y a en conséquence un moindre transport transplacentaire. L’étude indique que ceci ne serait pas nécessaire chez les femmes vaccinées initialement avec le vaccin Pw, car les anticorps après le rappel dTpa peuvent persister plus longtemps à l’âge adulte. Cependant, d’autres recherches sont nécessaires car la littérature (2) montre clairement que les doses de rappel dTpa chez les adultes ne provoquent qu’une faible augmentation du titre des anticorps spécifiques de la coqueluche, avec un déclin très rapide sur plusieurs mois. Puisque l’objectif est de transporter la plus grande quantité possible d’anticorps par voie transplacentaire, le taux chez la femme enceinte doit également être aussi élevé que possible.

Modifications génétiques

Dans la deuxième thèse de doctorat (3), Elise Hovingh cherchait à préciser dans quelle mesure et de quelle manière la bactérie contourne notre système immunitaire. En outre, l’auteur a étudié comment l’efficacité des vaccins contre la coqueluche pourrait être mieux évaluée.

Les changements génétiques que B. pertussis a subi au cours du temps ont un effet sur l’induction d’une réponse efficace de l’immunité innée. Le système immunitaire inné induit par les souches de B. pertussis récemment apparues consiste en une production accrue de certaines protéines anti-inflammatoires qui neutralise une réponse immunitaire efficace. Cela expliquerait en partie pourquoi, malgré le taux de vaccination élevé, la coqueluche aux Pays-Bas pose des problèmes.

Depuis l’introduction du vaccin contre la coqueluche acellulaire, on a isolé chaque année davantage de souches qui ne produisent plus l’un des antigènes vaccinaux, à savoir la pertactine. L’étude a examiné l’effet des souches négatives pour la pertactine sur le système immunitaire inné. Le B. pertussis dépourvu de production de pertactine induit une réponse immunitaire plus sévère. Ainsi, la production de pertactine par cette bactérie semble amoindrir la défense. L’hypothèse que la présence de pertactine dans le vaccin ait un effet sur le système immunitaire induit doit être étudiée de manière plus approfondie. Si tel était le cas, cela pourrait expliquer en partie pourquoi la protection obtenue par la vaccination avec le vaccin acellulaire ne perdure pas. Ceci est important en vue de sélectionner des antigènes candidats pour les nouveaux vaccins contre la coqueluche.

Le système du complément est important pour tuer les pathogènes tels que B. pertussis. Vag8 est connu comme une protéine du B. pertussis qui aide à contourner le système du complément. L’étude a découvert que Vag8 se lie à l’un des inhibiteurs du complément (inhibiteur de la C1), ce qui garantit la libération des protéases et la réduction des protéines du complément dans l’environnement de la bactérie. Le résultat final est qu’aucune dégradation ne survient chez B. pertussis et que la bactérie survit. B. pertussis a besoin de Vag8 pour activer le système de contact. Vag8 est mentionné dans la littérature comme potentiel antigène vaccinal contre la coqueluche. Sur la base de ses résultats, la doctorante recommande de modifier Vag8 avant qu’il ne soit inclus dans un vaccin, afin que cette liaison ne puisse plus avoir lieu.

En outre, elle a mis au point un "test de phagocytose expérimentale", test qui peut être utilisé pour déterminer le degré de reconnaissance et d’inactivation de B. pertussis par des anticorps induits par le vaccin. La phagocytose est importante dans la clairance de B. pertussis. Le test d’opsonophagocytose mesure la fonctionnalité des anticorps et est capable de montrer non seulement la différence entre les individus récemment infectés et guéris, mais aussi entre les individus guéris et les témoins. Ce test pourrait éventuellement fonctionner comme un corrélat de la protection. Il n’existe en effet pas de "corrélat de la protection" ou de moyen de mesure de la protection efficace pour prédire la protection contre la coqueluche. Des recherches de suivi sur l’optimisation et l’ajustement du test de phagocytose en cas de changement dans la population de B. pertussis peuvent aider à identifier une corrélation avec la protection contre la coqueluche.

Conclusions

Les connaissances nouvellement acquises montrent que le choix soit d’un vaccin Pw, soit d’un vaccin Pa, pour la primovaccination des nourrissons est déterminant pour la durée et la qualité de la protection contre la coqueluche plus tard dans l’enfance, l’adolescence et peut-être à l’âge adulte.
Les nouvelles connaissances sur les effets immunologiques de différents rappels de vaccination à différents âges, avec des vaccins différents ou non, aident à mieux comprendre la protection contre la coqueluche ou à l’améliorer avec de nouveaux vaccins. À l’avenir, cette information peut être utilisée pour protéger la population générale contre la maladie, avec des rappels aux moments les plus propices.

La deuxième étude ouvre une meilleure compréhension des interactions entre B. pertussis et le système immunitaire inné, avec un aperçu principalement des mécanismes que la bactérie utilise pour contourner le système immunitaire. Cette recherche aide à sélectionner les antigènes possibles pour les nouveaux vaccins contre la coqueluche et donc les stratégies optimales pour prévenir les infections à B. pertussis. Et les résultats sur la fonctionnalité d’anticorps spécifiques dirigés contre B. pertussis peuvent contribuer à la recherche de corrélations avec la protection.

Elke Leuridan, UAntwerpen

Références
1. Saskia van der Lee. Persistence of pertussis immunity in children and adults ; Influence of priming vaccination. Universiteit Utrecht. 2018
https://www.publicatie-online.nl/files/2115/2023/5351/15294_-_vdLee_ONL.pdf

2. Huygen K, Caboré RN, Maertens K, Van Damme P, Leuridan E. Humoral and cell mediated immune responses to a pertussis containing vaccine in pregnant and nonpregnant women.
Vaccine. 2015. 33(33) : 4117-23.
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0264410X15009287?via%3Dihub

Weston W, Messier M, Friedland LR, Wu X, Howe B. Persistence of antibodies 3 years after booster vaccination of adults with combined acellular pertussis, diphtheria and tetanus toxoids vaccine. Vaccine. 2011. 29(47):8483-6.
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0264410X11014708?via%3Dihub

3. Hovingh E. Unraveling the interactions
between Bordetella pertussis and the innate immune system. Universiteit Utrecht. 2018
https://www.rivm.nl/dsresource?objectid=51a59ae3-bc49-4177-ac69-b4ce3a4182ac&type=pdf&disposition=inline


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